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Recommandations aux pédiatres

Le pédiatre est en général le premier médecin à être témoin des signes d’alerte d’un comportement atypique des enfants. La consultation est souvent le fait des parents de l'enfant, mais fait parfois suite à des plaintes des enseignants ou de l’enfant lui-même. Dans tous le cas, le pédiatre a deux grands désavantages:

  • Etant en général le premier à être consulté, il ne dispose pas de l’orientation antérieure d’autres spécialistes
  • Il n’a en général pas assez de temps pour pouvoir effectuer une évaluation complète

Si nous ajoutons à cela que le TDAH est un état dans lequel influent de multiples facteurs allant du biologique (génétique, étape périnatale...) à l'environnement (lien altéré avec les parents aux premières étapes du développement, manque d’organisation adéquate à l’école ou à la maison, existence de problèmes familiaux…) on comprend que l’évaluation soit complexe et il est important de souligner dans ce guide les aspects fondamentaux que le pédiatre doit prendre en compte pour évaluer et rediriger l’enfant de façon appropriée.

Comme nous l’avons mentionné dans la partie diagnostic dirigée aux pédiatres, le diagnostic doit être fait par un spécialiste en psychiatrie de l’enfant, ou par un neuropédiatre, toujours en s’appuyant sur un historique clinique exhaustif de l'enfant, avec des informations provenant d’autant de sources que possible mais essentiellement de l’enfant lui-même, de sa famille et de ses enseignants. Le pédiatre peut cependant apporter une contribution précieuse au diagnostic, au suivi thérapeutique et en définitive au pronostic, à travers une série d’actions:

Bien accueillir le patient et sa famille lorsqu’ils viennent consulter, en essayant de poser les questions clés qui orientent le diagnostic du spécialiste

Les parents (la mère le plus souvent) consultent le pédiatre en mentionnant les problèmes occasionnés par leurs enfants. Ils viennent parfois sans l’enfant et indiquent dans certains cas que ces comportements ont lieu à l’école et que ce sont les enseignants qui ont attiré leur attention. Dans les cas les plus évidents, ils expliqueront que leur fils ou leur fille présente ces comportements à la maison, à l’école et à l’extérieur, lorsqu’il/elle est avec d’autres enfants. Quoi qu’il en soit, le pédiatre doit se montrer réceptif, attentif et faire preuve d’écoute active, en montrant de l’empathie pour les parents, sans essayer de minimiser leurs plaintes ni le problème même s’il a l’impression qu’ils exagèrent, mais en examinant la situation et en essayant de recueillir le maximum d’informations. Si les deux parents assistent au rendez-vous il convient d’obtenir des informations des deux. Si l’enfant est présent aussi, il est très important de lui consacrer un moment seul/e à seul/e, sans ses parents. Il faut toujours leur indiquer qu'il serait utile qu'un enseignant ou tuteur puisse communiquer sa vision du problème, par le biais d'un petit rapport écrit, d'une conversation avec les parents ou même d'une conversation téléphonique avec le pédiatre lui-même. Dans certains cas, l’école de l’enfant dispose d'un service de psycho-diagnostic ou d’orientation psychopédagogique, qui a peut-être déjà établi un rapport ou peut le faire au cours du processus de diagnostic. Profitez-en si c’est le cas, il est bon de rassembler le plus d’informations possible.

Réaliser un historique clinique complet permettant un criblage (screening) pour s’assurer qu’aucune autre maladie n'est à l'origine des symptômes exprimés

Il est primordial d’obtenir un historique médical complet, de la grossesse aux différentes étapes du développement de l’enfant. Nous avons déjà vu dans la partie diagnostic le besoin d’effectuer un diagnostic différentiel avec les autres problèmes médicaux. Le pédiatre est le médecin qui connaît le mieux l’enfant et il est le professionnel le plus à même de pouvoir suspecter quelque chose. Si l’enfant vient consulter le spécialiste avec un dossier médical complet, autant celui-ci que l'enfant et sa famille seront reconnaissants au pédiatre d'avoir facilité son travail.

Aspects à prendre en compte dans le recueil de données de l'historique clinique, si un TDAH est suspecté:

    • les symptômes typiques (hyperactivité/inattention/impulsivité) doivent être présents chez l’enfant sous une forme plus ou moins importante avant l'âge de 6 ans, même si les problèmes occasionnés ont été sans gravité jusqu'à présent.
    • les symptômes typiques doivent être présents au minimum dans deux des trois environnements dans lesquels évolue l’enfant (maison/école/extérieur)

Il est important de prendre cela en compte car comme nous l’avons vu dans la partie diagnostic, il existe d’autres troubles qui présentent des symptômes typiques du TDAH mais qui ne sont pas un TDAH et ne doivent donc pas être traités de la même façon.

L’existence d’une autre pathologie médicale causant une partie des symptômes du TDAH n’exclue pas forcément l’existence d’un problème de TDAH ni la nécessité de consulter un psychiatre pour enfant.

Diriger l'enfant vers le spécialiste compétent, en l'occurrence, le psychiatre pour enfant ou, par défaut, le neuropédiatre

Après avoir conduit l’évaluation médicale, le pédiatre pourra prendre une décision. Si l’enfant n’est pas venu au premier rendez-vous, il faudra bien entendu le faire venir pour l’examiner à part. Si les parents ne connaissent pas l’opinion de l’enseignant, il faudra leur redonner rendez-vous une fois qu’ils disposent de cette information. De même si l’un des parents n’était pas présent lors du premier rendez-vous. Il semble donc qu’une deuxième visite médicale soit nécessaire dans la plupart des cas, et le pédiatre peut la mettre à profit pour un second examen plus ciblé et corroborer ainsi les impressions de la première visite (une deuxième visite médicale est bien souvent indispensable pour que le professionnel puisse mieux cerner le cas). La deuxième visite médicale permettra aussi au pédiatre de disposer d’un peu de temps pour réfléchir au cas.

Une fois que nous disposons de l'information nécessaire, il sera possible de recommander un traitement ou de poursuivre l’étude à travers des examens complémentaires ou l’aide d’un spécialiste.

  • S’il suspecte un trouble en particulier, le pédiatre décidera quels examens complémentaires solliciter.
  • S'il suspecte un déficit sensoriel (visuel, auditif...), il dirigera l'enfant vers le spécialiste correspondant (ophtalmologue, othorinolaryngologue...)
  • S'il suspecte un déficit cognitif, il peut demander un psycho-diagnostic à un neuropsychologue ou selon le cas s’adresser au service psychopédagogique de l’établissement scolaire.
  • Si le problème ne semble présent qu'à l'école, il peut contacter directement le service de psycho-diagnostic ou d'orientation psychopédagogique, ou suggérer aux parents qu’ils le fassent.
  • S’il suspecte un problème familial, il peut contacter les services sociaux ou le planning familial, qui disposent de psychologues expérimentés en thérapie familiale. La plupart des régions espagnoles disposent d'au moins une équipe de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent au sein du système national de santé. Vous pouvez vous informer de leur existence sur votre lieu de travail à travers les services sociaux.
  • S’il suspecte un problème de santé mentale, comme par exemple un TDAH, il dirigera le cas vers un psychiatre pour enfants et adolescents, ou à défaut vers un neuropédiatre. La plupart des régions espagnoles disposent d'au moins une équipe de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent au sein du système national de santé.

Dans tous les cas, il prendra un autre rendez-vous avec la famille pour connaître le résultat de l’intervention ou des prises en charge par les spécialistes.

Réaliser le suivi du patient à plus long terme

Une fois que le trouble est dans une phase plus stable, il n'est pas nécessaire que l'enfant et sa famille consultent aussi souvent le spécialiste et le pédiatre pourra prendre un rôle plus central dans le suivi étroit du patient, puisqu'il est en général le professionnel qui dispose du plus grand nombre d'informations le concernant et celui que le patient consulte le plus souvent.

Dans les cas où les enfants reçoivent un traitement pharmacologique:

    • Connaître le traitement en question et ses principaux effets secondaires
    • S’assurer de sa disponibilité pour le patient
    • Essayer de renforcer l’observance thérapeutique (et si ce n'est pas le cas, en informer le spécialiste et la famille)
    • Suivre les constantes de poids et de taille, en les comparant aux courbes standard.
    • Réaliser un électrocardiogramme initial puis trois mois après le début du traitement, et ensuite tous les 6 mois, puis tous les ans à partir de la troisième année de traitement.
    • Recueillir lors de chaque visite le profil des éventuels effets secondaires de la médication que reçoit l’enfant

Dans les cas où le spécialiste a prescrit un autre type de traitement:

    • Réaliser un électrocardiogramme initial puis trois mois après le début du traitement, et ensuite tous les 6 mois, puis tous les ans à partir de la troisième année de traitement.
    • Recueillir lors de chaque visite le profil des éventuels effets secondaires de la médication que reçoit l’enfant
    • Examiner les conditions de vie de l'enfant dans son environnement familial, scolaire et social en essayant de compléter l’information pouvant échapper au spécialiste à cause de la distance
    • Faciliter le contact avec le spécialiste
    • Evaluer l’évolution de toute modalité thérapeutique reçue par le patient
    • Conseiller un mode de vie favorisant une vie saine: alimentation, exercice physique, meilleure communication des sentiments, participation à des activités de loisirs et de détente...

Ce qu’il faut surveiller lorsqu'un enfant avec TDHA reçoit une médication

Les médicaments généralement utilisés dans le traitement du TDAH sont:

  • METHYLPHENIDATE à libération immédiate (Rubifen) ou prolongée (Concerta, Medikinet)
  • ATOMOXETINE (Strattera)
  • DEXTROAMPHETAMINE
  • LISDEXAMPHETAMINE
  • MELANGE DE SELS AMPHETAMINIQUES

Les trois derniers ne sont pas encore disponibles en Espagne mais il est possible qu’ils soient un jour mis sur le marché.

Le plus employé en Espagne est le METHYLPHENIDATE. Des études ont prouvé son efficacité, en particulier dans les phases initiales et dans les cas les plus graves. Il y a un peu plus de trois ans, seul le méthylphénidate était disponible sur le marché espagnol, et uniquement sous la forme de libération immédiate. Cette forme produit un effet rapide, en moins d’une heure, et dure entre 2 et 4 heures. Elle s’élimine du corps de façon spontanée en moins de 12 à 24 heures. Ensuite sont apparues sur le marché les formes de libération prolongée, également à base de méthylphénidate, à travers un système qui permet de conserver l'effet pendant environ 12 heures avec un seul comprimé. Cela améliore la commodité d'administration puisque la forme à libération immédiate devait être prise 2 à 3 fois par jour pour que le médicament couvre au moins le temps scolaire tandis que la forme à libération prolongée ne requiert qu’une seule prise par jour. Des comprimés combinés associant la forme à libération immédiate avec une part de libération prolongée ont ensuite été étudiés. Aucune forme n’a démontré une efficacité plus grande que l’autre, ni un profil d’effets secondaires significativement différent. Le méthylphénidate est incompatible avec la prise d’antidépresseurs de la famille des IMAO. Parmi les effets secondaires les plus fréquemment observés figurent la perte d’appétit et les difficultés à trouver le sommeil. Dans certains cas on a observé l'apparition de tics, de céphalées, de douleur abdominale, de rongement des doigts ou des ongles, et même un retrait social, un aplatissement ou rétrécissement affectif (comme s’ils étaient immergés dans leur monde). Dans des cas extrêmes on a rapporté des symptômes psychotiques et même des crises de convulsions ou des altérations non spécifiques de l’électrocardiogramme. Même si ces effets sont extrêmement rares et que leur lien avec la médication soit mis en doute, il faut absolument arrêter immédiatement la médication et consulter le spécialiste s’ils surgissaient. Le pédiatre doit surtout examiner la perte d’appétit, la difficulté à trouver le sommeil, les tics et les douleurs abdominales ou les maux de tête, et rester attentif à tout nouvel élément que la famille ou le patient associent avec la médication. Il est pour cela recommandé de réaliser:

  • Un électrocardiogramme avant de débuter le traitement pharmacologique puis ensuite à trois mois et tous les six mois pendant les trois premières années de traitement. Un seul par an sera ensuite suffisant pendant toute la période où l'enfant prend la médication.
  • Peser et mesurer le patient tous les 3 à 6 mois (en comparant ces paramètres avec les tableaux normalisés) En cas de perte de poids ou de taille pouvant affecter la croissance de l’enfant, il faut immédiatement en informer le spécialiste.

En cas d’effets secondaires, il faut en informer le psychiatre. Sauf indication expresse du spécialiste, le traitement ne doit pas être suspendu le week-end ni pendant les vacances. Le méthylphénidate ne génère pas d’addiction. L’ATOMOXETINE est un médicament de la famille des antidépresseurs (du point de vue pharmacologique) bien que son effet ne soit pas antidépresseur mais aide à soulager les symptômes du TDAH. Son action survient après deux semaines de traitement sans interruption et ne doit pas être brusquement interrompu. Les effets secondaires sont en général passagers et n’apparaissent qu’au début. Les plus fréquents sont: nausées, gênes abdominales, vertiges, augmentation du rythme cardiaque et perte d'appétit (surtout au début). Il n'est généralement pas associé à une perte de poids par la suite. Des études ont prouvé son efficacité pour le traitement du TDAH et il ne génère pas d’addiction. Il n’est a priori incompatible avec aucune médication. Il s’emploie en général comme médicament de deuxième intention, lorsque le méthylphénidate n’est pas bien toléré ou qu’il ne se montre pas efficace, même si dans certains cas son usage peut être indiqué en première intention.

Les autres médicaments de deuxième intention utilisés en Espagne sont: BUPROPRION, CLONIDINA, GUANFACINA, PEMOLINA et même les ANTIPRESSEURS TRICYCLIQUES. Leur efficacité est mise en doute et ils sont davantage utilisés en cas de comorbidité.

Comme nous l’avons déjà mentionné, il n’est pas toujours nécessaire d’avoir recours à la médication dans les cas où un TDAH est diagnostiqué. Il faut prendre en compte la gravité des symptômes, l'âge auquel il se diagnostique et la possibilité des parents à apporter un soutien adéquat à l’enfant.